Exercices respiratoires de Qi Gong

Guide pratique. 2e partie.

Peter Minder¹      Traduit par Patricia Jan-Guyot

L'intention guide le Qi

Qu'avons-nous fait jusqu'à présent ? Dans un premier temps, nous avons mécaniquement expulsé l'air en exerçant une pression sur le bas du ventre, puis nous l'avons fait entrer en relâchant la pression, ce qui nous a permis de percevoir l'expansion et l'affaissement du bas du ventre.
Dans un deuxième temps, nous avons réalisé qu'en faisant entrer l'air, nous absorbons de l'énergie fraîche et cosmique et qu'en le faisant sortir, nous nous débarrassons de l'énergie viciée et usée.
Dans un troisième temps, nous avons constaté que ces processus sont liés à la respiration ; à l'inspiration, l'énergie fraîche s'écoule dans le bas du ventre par le nez, sur la face interne du torse, et à l'expiration, l'énergie négative sort par la bouche par le même chemin.

Le simple fait d’inspirer et d’expirer ne remplit cependant pas encore les conditions d'une respiration méditative. Pour rendre la respiration plus efficace, il faut l'associer à la représentation du Qi - de l'énergie qui circule. Avec la pratique et l'amélioration de la capacité de concentration et de visualisation qui en résulte, on parvient de mieux en mieux à diriger la représentation du Qi sur une certaine voie grâce aux mouvements respiratoires. Exprimés à l’aide des "trois trésors" (San Bao) : la volonté, l'intention, la résolution - Shen - dirigent le Qi et produisent ainsi de grands effets sur le plan matériel - Jing. C'est ce que nous connaissons dans la pratique du taijiquan : Le Qi peut être dirigé consciemment dans une partie du corps et dans un mouvement, déployant ainsi une grande efficacité sur le plan physique.

Lors de la prochaine étape des exercices respiratoires, nous ferons un premier pas dans cette direction.

2e phase : Respiration submergeante (Submerged Breathing²)

Debout en wuji, détendre le corps et l’esprit, fermer les yeux. Poser les deux mains sur qihai au-dessus de dantian au niveau du bas du ventre. Pratiquer la respiration abdominale (Abdominal Breathing) pendant 10 respirations.

Ensuite, après avoir expiré l’énergie viciée par la bouche, laisser à nouveau entrer de l'énergie cosmique fraîche par le nez dans le bas du ventre - sentir son expansion sous les mains. Faire une courte pause.

Puis, en exerçant une légère pression des mains sur le bas du ventre, expirer par la bouche et visualiser l'énergie cosmique qui, de qihai, descend doucement vers huiyin, le point vital du périnée. Imaginer l'énergie accumulée dans le bas du ventre débordant par la pression des mains et s'écoulant sur le devant du bas du ventre vers huiyin. Faire une pause de 1 à 2 secondes.

Inspirer par le nez - l'énergie s'écoule vers le bas du ventre. Faire une pause.

Expirer par la bouche - l'énergie s'écoule vers huiyin. Faire une pause.

Répéter cet enchaînement une dizaine de fois.
Laisser retomber les mains, toujours en position wuji, s’imprégner du silence et essayer de vider complétement l’esprit pendant la méditation debout, au moins pendant dix respirations (ou plus si souhaité).
Terminer cette méditation debout en se concentrant brièvement sur dantian.

Pour finir, refaire la routine finale (voir partie 1) puis effectuer ensuite quelques pas vigoureux autour de soi.
Répéter cet exercice tous les jours, le matin et, si souhaité, le soir également, pendant 2 à 3 mois. Augmenter lentement le nombre des cycles respiratoires pendant cette période jusqu'à environ 36.

Standing – Méditation debout

Lors du standing - soit en position wuji, les bras ballants détendus le long du corps, soit en position zhan zhuang, les coudes pliés et les épaules écartées - nous quittons la visualisation et nous nous tenons simplement debout, l'esprit détendu, en appréciant le silence.

L’esprit se comporte souvent comme une "horde de cent singes" (Monkey Mind) qui saute d'arbre en arbre en piallant. Il s'agite et saute d'une pensée à l'autre.
L'objectif de la méditation est de réduire le flux incessant de pensées et, dans l'idéal, de le réfréner complètement.

Pour cela, deux moyens sont proposés :

1. Réduire l'afflux de pensées en se concentrant sur une seule, par exemple en comptant les respirations (remplacer cent pensées par une seule).
2. La voie du zen (Chan chinois), dans laquelle on essaie de réfréner complètement les pensées.

La première option se pratique pendant la phase des exercices respiratoires : en observant la respiration et en visualisant le flux d'énergie, si nous y parvenons nous éliminons, toutes les autres pensées.

Au cours du standing, nous pouvons essayer d'emprunter la deuxième voie, plus exigeante. Chaque fois qu'une pensée surgit, nous la rejetons, sans nous attarder sur elle. On peut aussi imaginer que les pensées passent comme des nuages sur une montagne, la montagne les laisse simplement passer. Ou encore, on peut essayer d'imaginer le vide noir. Ou tout simplement : "Apprécier le silence" - placer le silence au centre de l'attention.

Au début, être complètement sans pensées n’est possible que pendant quelques secondes. Savourer ces secondes, elles deviendront de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de la pratique. On constatera aussi de grandes différences d'un jour à l'autre : un jour, on parvient presque sans peine à chasser les pensées, le lendemain, elles nous sautent à nouveau dessus comme "cent singes".

Comme nous nous entraînons quotidiennement, cela n'a aucune importance. Ne pas s'énerver si on n'y arrive pas très bien, observer, constater sans juger - et comme dit précemment, savourer le silence intérieur, même s’il ne dure qu’un court instant.
La méditation debout, pratiquée de cette manière, offre une préparation idéale à la méditation assise.

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¹ Sources : Wong Kiew Kit : The Art of Chi Kung, Cosmos 2014 ; Chi Kung for Health and Vitality, Cosmos 2014 ; www.shaolin.org 
Leo Lackinger : Séminaire en ligne ; www.shaolin-wahnam-wien.at Div. littérature et expériences personnelles

² Le terme "Submerged Breathing" (respiration submergeante) vient du Sigung Wong - la traduction qui correspond le mieux à la sensation ressentie lors de cet exercice serait „débordante“.